Voici un portrait de la charmante June Alysson, pârtenaire de Gene dans les Trois mousquetaires (1948).
Née en 1917, June Allyson est issue d’une famille très pauvre. Victime d’un grave accident (suite à la chute d’un arbre), la jeune fille est contrainte de prendre des cours de natation, gymnastique et de danse pour sa rééducation. Elle débute dans de petits rôles à Broadway en 1938, mais ne se fait vraiment remarquer qu’en 1941 dans l’opérette « Best food forward ». Impressionné par les jeunes talents figurant dans le spectacle, le producteur Arthur Freed (le roi de la comédie musicale) décide de les embaucher presque tous pour la version filmée (sauf une actrice, qui de dépit, se suicidera). Ce musical moyen dont la vedette est Lucille Ball connaîtra également le succès à l’écran. June fait aussi une courte apparition dans Girl Crazy(1943) dont la vedette est Judy Garland, qui deviendra une de ses meilleures amies. De son étrange voix rauque et enrouée, elle braille une chanson comique, dans un style fortement inspiré de Betty Hutton fort populaire à l’époque. Toujours produite par Freed, l’insignifiant musical Meet the people provoquera quelques remous, certains critiques y discernant des arrières pensées politiques pro communistes. C’est lors du tournage de ce film que June tombera amoureuse de Dick Powell, grande star des comédies musicales de la Warner des années 30, et mari de Joan Blondell, qui divorcera pour épouser June.
Dans son roman autobiographique à clés, Joan Blondell décrira plus tard avec beaucoup d’amertume et d’acidité June comme une voleuse de mari, fausse et hypocrite sous ses airs bon enfant. Atteinte par ses attaques, June répliquera dans sa biographie que lors de sa rencontre avec Dick, ce dernier était déjà séparé de Joan.
Alors que sa vie sentimentale lui sourit, June rencontre également un gros succès populaire dans le musical « 2 jeunes filles et un marin ». La MGM misait à l’origine à fond sur la co-vedette Gloria de Haven, plus jolie et meilleure chanteuse, et pourtant c’est June qui récoltera les marrons du feu. Sa personnalité chaleureuse et attachante, sa voix parlée rauque et tendre si particulière, son interprétation déchaînée du « young man with a horn », et son coté simple et naturel plaisent immédiatement au public. Après un autre musical avec la petite Margaret O’Brien, Tendre Symphonie (1945), la MGM va donner plus de latitude à la carrière de June en la distribuant avec un égal bonheur dans des comédies avec Van Johnson, à l’époque la coqueluche des adolescentes ou des mélos (June s’avère très douée pour les scènes de larmes !). Il s’agit toujours de films familiaux où June incarne invariablement l’américaine moyenne, qui lutte contre l’adversité, sourit à travers ses larmes, et finit par gagner. Elle est souvent très convaincante, en tous les cas terriblement attachante.
Evidement, on lui réserve aussi quelques apparitions dans des grandes productions musicales comme la pluie qui chante (son numéro est un des plus charmants du film) ou ma vie est une chanson(1948).
En dépit de sa réticence à jouer un rôle en costumes pour lequel elle se juge peu crédible, June obtient un franc succès en jouant le douce Constance Bonacieux de la picaresque et très réussie version des trois Mousquetaires de George Sidney (1948) avec Gene Kelly (ce que j’ai pu adorer ce film et tout particulièrement June Allyson quand je l’ai vu pour la première fois à la télé !).
A la même époque, June Allyson a l’immense chance de se voir confier le rôle principal de Vive l’amour (1947) un des grands classiques du film musical. Bouillant de rythme et de joie de vivre, ce film est un régal que je recommande tout particulièrement. Le numéro final « varsity drag » dansé par June et Peter Lawford est tout simplement extra. Et dire qu’elle a failli refuser le rôle au motif que le chorégraphe Charles Walters n’avait jamais réalisé un film avant !
June Allyson est également excellente dans le rôle du garçon manqué de la plus célèbre version des 4 filles du Dr March(1949).
Prévue à l’origine pour jouer face à Fred Astaire dans Mariage royal (1951), elle doit renoncer au rôle quand elle découvre qu’elle attend un bébé (dommage, on aurait bien aimé la voir sur « how could you believe me » bien que sa remplaçante Jane Powell s’en tire très bien).
En 1954, elle joue le rôle de l’épouse de Glenn Miller dans la célèbre et très réussie biographie musicale du fameux chef d’orchestre auteur des immortels « in the mood » et « moonlight serenade ». Elle était évidemment toute désignée et parfaite pour interpréter la jeune femme simple, dévouée et attentionnée pour son mari, (pourtant certains critiques, fatigués de ce genre de rôles ultra conventionnels et démagogiques finissent par la trouver agaçante). Le mystère plane toujours sur les réelles raisons du décès de Glenn Miller, mais évidemment le film n’en parle pas.
June Alyson a également l’occasion de faire valoir ses qualités de comédienne dans le décevant remake de « Femmes » et d’ailleurs, les critiques noteront à l’époque que dans la distribution (pourtant prestigieuse) elle est la seule actrice peut être meilleure que dans la version de 1939 (jouée par Norma Shearer). Elle y reprend son fameux « young man with a horn » qui l’avait rendue si populaire en 1944.
Les changements de mode vont progressivement mettre sur la touche June Allyson, et ses rôles d’épouse dévouée (ce qu’elle n’était peut être pas tout à fait dans la vie réelle car sa liaison passionnée avec Alan Ladd a bien failli briser son couple). En 1963, se vie bascule quand Dick Powell son mari décède d’un cancer. Ce dernier avait eu le malheur de produire quelques années auparavant un film dans un désert dans lequel avaient été testées des bombes atomiques. Les comédiens du film, John Wayne, Susan Hayward, Agnes Moorehead mourront tous d’un cancer dans les années qui suivent.
June, abattue, se réfugie dans l’alcool. Invitée par sa copine Judy dans son show télé, elle donne une curieuse prestation. La chanteur et producteur Mel Torme laissera entendre que les deux femmes étaient ivres à l’antenne. Incapable de supporter la solitude, elle se remarie 3 mois après le décès de son mari, avec un homme très riche, avec lequel elle fréquente la jet set de Capri au Cap d’Antibes.
Par la suite, on la retrouvera de temps à autres dans des téléfilms sans grand intérêt, ou des séries télé produites par Aaron Spelling. Remariée à un dentiste depuis 1976, elle coule des jours heureux et consacre une partie de son immense fortune à une fondation pour aider les personnes souffrant d’incontinence.
Une amitié de plus de 60 ans : Gloria de Haven et June Allyson